Au risque de nous répéter, les Mondes Virtuels sont un terrain extraordinaire en matière d’e-Learning.
Là où le web et sa 2D passive apporte un début de solution complémentaire à la Formation traditionnelle, les Univers Virtuels apportent une réponse bien plus puissante.
Cela tient principalement sur deux caractères forts :
– La 3D donne du sens et ouvre des opportunités pédagogiques inédites à ce niveau de coût,
– Le caractère présentiel d’un Univers Virtuel fait passer la formation du libre-service à l’assistance forte : il y a un être humain derrière l’avatar et les apprenants…
Au delà de nos travaux de recherche sur le sujet, nous avons déjà mené plusieurs projets de formation dans les Univers Virtuels, certains de grande envergure comme l’Immersive Training Center du Crédit Agricole, et d’autres plus modestes dans leurs ambitions mais tout aussi innovants.
Ce que nous avons appris, en élaborant ces projets n’est pas simplement encourageant ; c’est tout simplement révolutionnaire. Nous avons l’extraordinaire sensation de découvrir tout un univers de possibilités nouvelles !
Je vais essayer de vous expliquer ce qui nous rend si enthousiaste, en commençant par un aveu de faiblesse.
Lorsque nous avons commencé à nous pencher sur le sujet, nous avons d’abord cherché à améliorer l’approche et la valeur ajoutée des solutions de e-Learning disponibles sur le marché en proposant une alternative bien plus puissante, tout en étant persuadé que l’on aurait du mal à égaler voir remplacer ce bon vieux cours dispensé par un formateur, en présence de ses 8 stagiaires, dans un beau centre de formation avec vue sur le parc.
C’était faux !
En effet, en déployant les premiers projets, nous avons du inventer une nouvelle façon de former à distance, pour coller aux besoins de nos clients, mais également à leur culture et leur niveau d’équipement technologique.
Paradoxalement, nous avons décliné nos méthodes de ce qui se fait dans une formation physique d’une part (je n’ose pas dire réelle, car les formations dans les Univers Virtuels sont intangibles, mais n’ont pas grand chose de virtuel) et des Best Practices en matière d’e-Learning sur le Web. Ce n’était pas la meilleure approche, nous le savons aujourd’hui, mais c’était la plus pragmatique. En effet, l’objectif quand vous donnez un cours dans un monde virtuel n’est pas de réaliser une performance technologique mais bien de passer et d’ancrer des messages.
Nous avons donc reproduit ce qui existe dans la réalité physique à savoir des salles de cours équipées de chaises et de bureaux, d’un pupitre, de tableaux blancs interactifs, de diffuseurs de slides, de vidéo et d’audio… Nous avons également recréé les fameux “Coffee Breaks” à l’extérieur des salles de cours ou de conférence, ajoutant ainsi des zones de convivialité à ces dispositifs.
Pourtant, cela n’a aucun sens !
Un avatar n’a pas besoin de s’asseoir dans une salle, de prendre un café ou d’utiliser un bureau. Il n’a d’ailleurs pas besoin de salle non plus ! Il n’est que votre représentation numérique dans un univers virtuel, comme votre adresse email peut l’être pour votre messagerie.
Mais nous reproduisons la réalité pour donner des repères familiers à la fois au formateur et aux apprenants, car l’idée est de ne pas désorienter chaque participant pour l’aider à se concentrer sur l’essentiel : la diffusion du message et l’ancrage de celui-ci.
La pause café, par exemple, sera le moment où chacun pourra aller voir le formateur pour lui poser une question qu’il juge trop spécifique ou personnelle pour l’avoir posé durant la session. Si vous ne créez pas ce dispositif, la question ne viendra pas. Pourtant, elle fait souvent partie intégrante de la formation dans son ensemble.
Cependant, nous pourrions aller beaucoup plus loin dans la méthode… et surtout, faire bien mieux que ce que nous pouvons faire dans la réalité physique !
Voici 3 exemples de ce que nous apportent les univers virtuels en matière de formation à distance, qui ne serait pas possible autrement, y compris dans la vie physique.
1- Utiliser la 3D à des fins pédagogiques
Un Univers Virtuel comme Second Life (ou sa rétro-conception OpenSim) propose une représentation de la réalité en 3 dimensions.
Imaginons (et c’est un cas réel, pas de la prospective) que nous souhaitions former des opérateurs à l’utilisation d’une machine outil unique au monde. Nous devons aujourd’hui attendre que le constructeur réalise la machine, l’achemine à l’usine, l’installe et la mette en service, avant de pouvoir commencer à former les ouvriers qui travailleront ensuite dessus. Cette formation, de quelques jours à quelques semaines, est une lourde perte pour l’entreprise qui doit commencer à produire au plus tôt pour rentabiliser son investissement.
Nous pouvons recréer aujourd’hui la même machine outil dans Second Life ou sur un server OpenSim, dans un environnement fermé au public et sécurisé, sur la base des plans réels reproduits à l’échelle (en général, pour faciliter l’utilisation par des avatars, on utilise une échelle de 1,3 ou 1,4) et en développant les scripts qui feront que la machine se comportera exactement comme celle qui sera livrée quelques semaines plus tard.
Ainsi, nous pouvons commencer les sessions de formations dans Second Life avant même que la machine ne soit terminée et livrée, avant de compléter et terminer le cursus sur la machine réelle une fois celle-ci installée.
2- Corriger en temps réel la qualité du cours dispensé
Ceux qui ont déjà donné des cours ou simplement réalisé des interventions publiques vont comprendre tout de suite l’importance de ce point. Enormément d’apprenants n’osent pas interrompre un formateur ni même poser des questions à l’invitation de celui-ci. Les raisons, souvent mauvaises, sont multiples, allant de la timidité à la peur de passer pour un idiot.
Bien-sûr, le “body language” est un indicateur précieux pour les formateurs expérimentés, mais il est loin d’être infaillible.
Lors d’une formation dans un univers virtuel, il n’y a que peu de signes physiques d’un désintérêt (mais il y en a tout de même quelques uns) mais ce défaut est très largement compensé par la protection que représente l’écran de l’ordinateur. Même s’il n’y a pas d’anonymat pour autant, une personne timide se sentira plus à l’aise pour poser une question ou pour marquer son manque de compréhension, car la distance que donne l’avatar devient alors un formidable atout de prise de confiance. Le formateur va ainsi avoir un meilleur retour de sa capacité à passer le message qu’en présence physique des mêmes stagiaires.
Mais on peut faire beaucoup mieux que cela. Imaginons une minute que les mêmes stagiaires soient à présent habitués à l’usage des mondes virtuels. Plus besoin de recréer une pièce singeant une salle de formation, car les apprenants ont maintenant fabriqué de nouveaux repères. Nous allons dispenser ce cours dans une salle, sans mobilier, dont le sol sera peint en vert du coté droit et en rouge du coté gauche, les couleurs évoluant en dégradé d’un coté à l’autre. Vous invitez alors les apprenants à bouger leur avatar au fur et à mesure du cours, dans la zone rouge s’ils ont du mal à comprendre et dans la zone verte s’ils sont à l’aise à avec le cours dispensé.
Le formateur dispose alors d’un véritable baromètre en temps réel de la qualité de sa pédagogie, et peut alors l’adapter en temps réel si nécessaire. Si, par exemple, l’écrasante majorité des stagiaire est dans la zone rouge, cela signifie que ses messages ne passent pas du tout et qu’il doit immédiatement changer sa façon de communiquer. Dans la vie physique, il serait bien trop perturbant sur le plan émotionnel et de la concentration de demander à même chose aux stagiaires, alors que dans un monde virtuel, il suffit de deux doigts sur les flèches du clavier pour obtenir le même résultat.
3- Ancrage et piqûre de rappel
Dans la majorité des cas, il est extrêmement utile pour ne pas dire indispensable, de faire ce que l’on appelle une piqûre de rappel. Il s’agit en fait d’une session allant de 2 heures à une journée, réalisée quelques temps après la formation proprement dite et destinées à ancrer profondément l’apprentissage chez le stagiaire.
En général, le centre de formation et le lieu de travail du stagiaire n’étant pas sur le même lieu ou dans la même ville (voir dans le même pays !), ce rappel n’est pas fait, sacrifié sur l’autel de la réduction des coûts ou pour éviter un effort logistique jugé trop important pr rapport au bénéfice retiré.
Cette session de deux heures, dans un monde virtuel ne va rien coûter de plus et prendre vraiment… deux heures. Elle peut même être réalisée hors du bureau, pour les collaborateurs qui sont très souvent en déplacement. Il devient donc tellement simple de l’organiser et de la suivre, que ce rappel retrouve toute son efficacité en matière d’ancrage.
Nous pourrions évoquer pendant des heures les avantages qu’une entreprise peut avoir à déployer un plan de formation dans un monde virtuel, car nous devons encore avoir quelques dizaines d’exemples. Je ne nie pas non plus un certain nombre d’inconvénients, le principal étant le fait d’amorcer la pompe pour apprendre aux collaborateurs à travailler avec et dans un monde virtuel. Pourtant, c’est bien le sens de l’histoire et je crois qu’il est vital pour une entreprise d’y préparer ses équipes.
Si vous avez lu cette longue note jusqu’au bout (Bravo), nous aimerions surtout que vous reteniez deux choses :
– Faire de la formation dans Second Life n’est pas un simple palliatif, mais une véritable alternative à très forte valeur ajoutée.
– Le caractère présentiel d’un Univers Virtuel fait que le formateur est à nouveau au centre du dispositif… et on n’a pas encore trouvé mieux qu’un formateur pour former